memories haunt my mind (maddie) ~

Citation :

maddilynn and riley

❝ never forget what i did, what i said ❞

Je venais très rarement au cimetière, excepté pour des enterrements comme pour monsieur le Maire mais sinon, je ne venais jamais rendre visite à mes parents, j'avais trop de peine, trop de choses que je gardais en moi à propos d'eux, malgré les années et malgré l'aide de Maddie durant mon adolescence pour faire mon deuil. Le fait est qu'elle-même n'avait pas réussi le sien, c'était sûrement pour ça que je ne croyais pas que le mien pourrait aboutir un jour, je ne finirais jamais mon deuil, jamais. A vrai dire, avant, lorsque j'avais Maddie et que j'avais Abbie, j'arrivais à surmonter tout ça, mais depuis toute cette histoire, Maddie n'allait plus très bien, je n'avais plus Abbie et pour tout dire, moi non plus je n'allais plus très bien. C'était la décadence, la descente aux enfers une fois de plus.

Cela faisait quelques jours qu'à la sortie du travail, je venais ici, sur ce parking, devant ce fameux cimetière, à ressasser mes idées noires, me remémorer de beaux souvenirs que j'avais de notre famille avant la mort de maman et papa, m'imaginer ce que nous serions s'ils étaient encore là, ce que nous ferions à cette heure-ci. Beaucoup de questions se bousculaient et malheureusement, je n'étais pas en mesure d'y répondre. Maddie le serait sûrement elle, du moins elle essaierait de me rassurer, car même si elle souffre, elle a toujours cette lucidité et cette maturité incroyable. Je regardais devant moi quand je vis quelqu'un à la fenêtre de ma portière, c'était elle, Maddie. Elle avait donc eu la même idée que moi, mais visiblement, elle était plus courageuse, comme toujours. Je lui fis signe de monter du côté passager, ce qu'elle fit rapidement.

A peine entrée dans le véhicule, elle me serra dans ses bras, ayant compris ce qui m'amenait là et pourquoi je restais dans ma voiture. « Maddie.. » lançai-je, sur un ton neutre, avec une touche sentimentale tout de même, « Tu viens souvent ici ? » repris-je après quelques instants, une fois que nous nous étions séparés. A vrai dire, je savais déjà ce qu'elle allait dire, mais j'avais besoin de lui parler.

Maddilynn faisait partie de ses gens qui malgré le temps qui passait, ne pouvait s’empêcher de garder en mémoire chaque geste, chaque parole, chaque trace de leur existence. Qu’importe ce qui pouvait lui arriver, un petit fragment de son passé allait refaire surface. Cela pouvait être destructeur vous savez ? De vivre avec un pied dans le passé et un pied dans le présent, ne pas se posez la question existentielle qui est : « Qu’est-ce qu’il va m’arrivez demain ? ». Pourquoi donc ? Et bien parce que plus vous souffrez et plus vous ne profitez pas de la vie comme vous l’auriez souhaité … Si Maddilynn devait être sincère lorsqu’elle parlait de la souffrance qui faisait rage à l’intérieur de son cœur et qui la détruisait un peu plus chaque jour, elle dirait que oui parfois elle en veut à ses parents d’être morts, de ne pas s’être battu un peu mieux face à cet être infâme qui les a tué sans aucun remords. Ce n’était pas leur faute, mais comment arrivez à surmonter la douleur à part rejeter la faute sur les autres ? C’était tellement mieux que de se remettre en question. C’était tellement plus jouissif que de chercher à enfin faire son deuil.

Maddilynn regarda son reflet dans le rétroviseur. Ses yeux … ils reflétaient tellement bien son mal être profond. Elle pouvait chercher à mettre une tonne de mascara, de fard à paupière, cela ne servirait strictement à rien. Une part d’elle-même était morte depuis longtemps et seuls les sourires restaient sa seule armure pour pouvoir le cacher. Heureusement, il y avait Riley son petit frère, celui qui a toujours été là, qui a surmonté en même temps qu’elle. Elle baissa les yeux en pensant à lui. Bien sûr que lui aussi il souffrait, elle le savait il n’avait pas besoin de le dire. Mais parfois c’était dur. Dur de surmonter sa propre douleur ainsi que celle des autres en rejetant l’aide des autres soi-disant parce qu’ils ne pouvaient pas comprendre. Rester seule dans sa tristesse, sa rancune, c’était ce qu’elle arrivait le mieux à faire.
Machinalement, elle sortit de sa voiture claquant la porte derrière elle sans le moindre bruit. Elle ne bougea pas, se contentant juste de rester appuyé sur sa voiture, scrutant chaque petit détail du cimetière. Venir ici, c’était un peu le seul moyen qu’elle avait trouvé pour se réconforter, pour se dire que ses parents étaient toujours là, certes sous terre mais quand même présent. C’était aussi un supplice. A chaque pas qu’elle faisait entre les tombes, elle avait l’impression de revivre avec exactitude le jour où le téléphone sonna et où son petit monde s’écroula autour d’elle. Malgré tout, elle prenait sur elle. Ce n’était pas le genre de personne à s’apitoyer sur son sort, elle détestait ça d’ailleurs les gens qui se plaignaient. Peut-être qu’elle souffrait, voir même un peu beaucoup trop dans sa vie ces temps-ci, mais elle essayait quand même de chercher à voir le bon côté des choses, à essayer de ne pas faire partager sa tristesse à autrui, ça serait tellement égoïste sinon. Un bruit la fit basculer la tête sur le côté, et elle reconnut la voiture de Riley. Cela ne la surprenait pas vraiment qu’il venait ici. Ses spartiates claquant sur le bitume frais, elle se dirigea vers lui, sachant pertinemment qu’il allait la voir.
A peine fut-elle rentrée dans la voiture, qu’elle le serra dans ses bras de toute ses forces. C’était sa manière à eux de se dire « Ne t’inquiète pas je suis là quoi qu’il arrive ». Dans la famille, elle a toujours été la plus forte et ça même étant petite, elle faisait preuve d’un grand courage. Peut-être parce qu’elle avait plus de facilité à cacher ses sentiments que d’autres. Contrairement à son frère, qui cherchait désespérément des réponses à des questions, ce qui s’était amplifiée depuis l’histoire avec Morgan et Abbie. Tout un tas de raisons qui avait fait que Maddilynn ne savait plus quoi penser ces jours-ci. L’étreinte terminée, elle le regarda droit dans les yeux, comme-ci elle lisait déjà sur ses lèvres. « La plupart du temps oui. »Pourtant, quelque fois, elle restait juste dans sa voiture, à contempler les pierres tombales au loin, n’ayant pas la force de faire un pas de plus. Et quand elle s’absentait et qu’on lui demandait où elle était passée, elle répondait juste qu’elle était partie faire une course. Elle qui pourtant appréciait beaucoup plus la vérité que le mensonge, n’osait pas avouer que plusieurs fois par joue, elle allait au cimetière et s’effondrait en pleur en repensant à ses parents. Un souvenir lui revenu d’ailleurs en tête. Un souvenir qui l’avait toujours fait sourire. « Tu te souviens ce jour-là où s’étaient disputés au point de se faire du mal et que Maman était arrivée en courant ? Et qu’elle nous avait dit en tentant de sécher nos larmes, qu’il fallait toujours sourire quoi qu’il arrive ? »Ce simple souvenir déclencha un rire chez Maddilynn. Un rire mélangé de bonne humeur et de profondes tristesses. Des souvenirs comme celui-ci, ils grouillaient dans sa mémoire. Certes ils la faisaient sourire mais cela lui rappelait le manque qu’il y avait dans sa vie, ce manque qu’elle n’allait jamais réussir à combler. Sentant que les larmes commençaient à faire son apparition, elle s’essuya les yeux d’un revers de la main. « Riley … ils me manquent … Papa et Maman, leurs sourires … leurs … » Ses paroles ne furent plus qu’un simple murmure inaudible. A quoi bon dire ça ? C’était tellement stupide, elle se faisait tellement de mal à se recasser ses vieux souvenirs. Elle savait que ce n’était pas le genre de choses que Riley avait besoin d’entendre et pourtant elle le disait, malgré elle. Au fond, elle savait que revenir au cimetière ce n’était pas une bonne chose. Cet endroit était tellement morbide, tellement remplis de souvenirs, tellement … mort et joyeux à la fois pour sa façon d’arriver à faire rappeler des souvenirs.