Conflicts again and again | PV Aaron {TERMINEE

Tapotant ses doigts sur la table, Camélia posa un regard plein de rage sur ses ongles. Poussant un soupir, elle continua à tapoter sur la table, sans dire le moindre mot. En aucun cas elle n'essayait de calmer sa colère, elle se doutait que cela était vain. Puis, elle n'avait pas très envie de passer outre cette dispute et cette fois-ci de donner raison à son père. Selon l'adolescente, c'était son père, encore une fois, qui venait de déclencher la dispute. Elle, elle n'y était pour rien. Elle venait juste de se défendre. Comme toujours. Parmi les qualités qu'elle pouvait avoir, la jeune fille se rendait bien compte qu'elle avait un véritable sens à la défense. Loin d'être franche, Camélia savait quand même rétorquer dès que quelqu'un lui disait quelque chose qu'elle n'appréciait pas forcément. C'était peut-être un d'un des aspects de son caractère qui faisait qu'elle avait un caractère bien trempé. Son enfance dans l'orphelinat l'avait peut-être aussi grandement aidé à obtenir ce genre de caractère. Dans tout les cas, chaque personne savait que dès que l'adolescente pouvait facilement s'importer quand quelque chose ne lui plaisait pas forcément. D'ailleurs la plupart de ses amis, savait qu'il était très difficile de faire entendre raison à Rose, tellement elle était têtue. Et avec Aaron, cela n'échappait pas à la règle. Leur caractères très similaires étaient la cause de nombreux conflits, où chacun remettait l'autre en cause ; en pensant presque que c'était l'autre et non soit-même qui donnait naissance aux disputes. Chose qui était peut-être pas entièrement vrai. Toutefois, lorsque Camélia avait appris que Lily était partit faire un tour en ville, et que Aaron était resté à la maison ; elle avait sût à l'instant qu'une dispute allait éclater. C'était si évident. Elle ne comptait d'ailleurs plus le nombre de conflits, tant ceux-ci étaient présents. Pourtant, pour une fois elle savait bien que cette fois-ci elle était peut-être un peu en faute, elle aussi. Même si c'était un peu difficile à avouer.

Après, un second soupir, l'adolescente finit par s'exclamer. « De toute manière, je vais bien partir un jour de cette maison. Je n'aurais qu'à aller habiter avec Romain tiens ! » Un petit sourire qui ne dura que quelques secondes s'afficha sur ses lèvres. Bien entendu, elle se rendait compte qu'elle était en train de mettre à rude épreuves les nerfs de son père, mais c'était plus fort qu'elle. C'était sa façon à elle, de lui faire comprendre ce qu'elle ressentait. Puis, Camélia ne pouvait pas s'empêcher de faire preuve d'agressivité envers Aaron, c'était presque instinctif. Elle avait mentionné le nom de Romain, de manière irréfléchi, comme-ci ce prénom avait franchit le seuil de ses lèvres avant qu'elle ne réfléchisse à une phrase beaucoup plus pertinente. Fort heureusement pour elle, c'est que personne ne savait véritablement si ce qu'elle son aventure avec Romain était véritable ou non. Seule elle, savait que cela n'était qu'un tissu de mensonge dans le seul but de provoquer ses parents et surtout Aaron. Même le jeune homme concernait ne savait pas qu'elle se servait de lui. En effet, Camélia arrivait à cacher les soupçons d'une manière subtile. Puis, elle ça l'amusait. Beaucoup même. Mais, savoir que le simple fait que ses parents ne se posent des questions sur cette relation, où Romain et Camélia n'ont pas le même âge, suffisait à l'adolescente pour continuer cette histoire fausse. Pourtant, elle savait que tôt ou tard ça allait mal tourner. Que cela allait lui retomber dessus, et que les conséquences allaient peut-être être proportionnelles à celles dont elle se doutait. Que Romain ignore cette fausse relation qu'elle faisait croire à ses parents, que Lily et Aaron savent que cela n'était pas vrai ; c'était quelque chose dont redoutait un peu Camélia. Alors, que d'habitude elle était confiante, elle se disait qu'elle allait pouvoir gérer telle ou telle situation. Mais, là le pessimiste l'avait envahit sur la confiance. C'était plus fort que tout. Peut-être que courir le danger c'était ça qui lui plaisait. Peut-être que tout ce qu'elle avait traverser et tout ce qu'il lui restait encore à traverser, ne lui servait pas à grande chose. Peut-être que c'était le seul moyen qu'elle trouvait pour se dire que sa vie n'était sûrement pas si mal. Oui, peut-être que c'était ces raisons là qui poussait la jeune fille à faire des conneries, à faire des trucs qu'elle n'aurait peut-être pas fait dans d'autres circonstances.

Son regard se posa sur Aaron, afin d'observer sa réaction. L'air de la pièce était tendu. Un climat électrique envahissait petit à petit la pièce. Si Lily avait été là, alors peut-être que ce climat aurait vite disparu et peut-être même que les tensions entre le père et la fille se seraient apaisées. Seulement, ce n'était pas le cas. Camélia s'en rendait compte, seulement elle faisait semblant de ne pas remarquer l'électricité qui pouvait régner dans l'air. Quelques minutes après, elle cessa enfin de tapoter ses doigts sur la table, ne baissant toujours pas le regard. Fronçant les sourcils, elle remit une mèche de ses cheveux en place avant de croiser les bras. Puis, elle fit un pas, en direction de sa chambre. Cependant, elle s'arrêta un instant pour se retourner vers son père, sachant très bien que la dispute n'allait pas en rester là. « Et.. » Elle s'interrompit soudainement, prenant conscience que ce qu'elle s'apprêtait à dire n'allait rien changer. « Non, en fait rien. » Les sourcils toujours froncés, Camélia ne savait pas si la bonne solution était de partir dans sa chambre comme elle le faisait si souvent. Mais, après un court temps de réflexion, elle opta finalement pour cette idée. D'un pas vif, sans attendre les paroles de son père, elle partit dans sa chambre, en claquant bien vivement la porte ; afin de faire comprendre sa colère.

C'était toujours pour des motifs futiles qu'elle se disputait avec Aaron. Aujourd’hui, la raison du conflit avait été que Aaron en avait un peu marre que la jeune fille lui demande presque toutes les semaines si elle pouvait sortir. Selon l'adolescente, il était normal qu'un jeune de dix-sept ans sorte ; au moins cela prouvait qu'il avait une vie sociale. Et selon elle, elle ne sortait pas si souvent que ça. Seulement lorsque les occasions se présentaient. Puis, il faisait un temps magnifique, ce qui annonçait une soirée tout aussi magnifique. Mais les arguments qu'elle avait pu trouvés n'avait rien donné, et cela avait rapidement tourné à la dispute.

Seule dans sa chambre, Camélia mit ses écouteurs sur ses oreilles afin de se détendre. Pourtant, elle se doutait, savait, qu'à un instant donné son père allait venir frapper à la porte pour demander des explications d'un tel comportement. La jeune fille ne savait pas encore si elle allait vraiment lui révéler les raisons d'une telle agressivité en son égard. Se confier n'avait jamais été véritablement quelque chose qu'elle appréciait.

Aaron se passa les mains sur le visage. Peut-être pour essayer de se calmer, pour ne pas relever les paroles de Camélia. Mais cela n'allait pas passer si facilement. C'était comme coincé au creux de sa gorge et il savait que rien ne pourrait déloger cet envie qu'il avait de lui clouer le bec ! Camélia le provoquait, inlassablement, calmement, sournoisement. Elle savait comme le mettre en rogne, même pour pas grand chose. Pourtant, il n'y avait pas de quoi se prendre la tête, si ? Aaron venait seulement de lui dire qu'elle cesserait de sortir tous les quatre matins. Et encore, il ne lui avait pas parlé de ses devoirs qu'il trouvait bien trop rapidement fait ! Non, il ne lui avait rien dit de tel !
Il s'était même trouvé particulièrement sympathique et à l'écoute. Mais peut-être se jetait-il des fleurs ? Peut-être qu'il n'était pas comme il se pensait. Pourtant, il s'imaginait renvoyer une image de père attentif et aimant, ce qui ne semblait pas forcément la cas du point de vue de sa fille. Fille qui le poussait à bout et donc ne lui permettait pas d'être "gentil". Camélia avait un goût prononcé pour les phrases qui clouait tout le monde sur place. Ce qui était un point positif lorsque cela ne se rapportait point à son père ; elle avait cet avantage de savoir répondre aux... aux attaques. Oui, bon. Peut-être qu'il répondait un peu trop franchement aussi, mais il était ainsi ! Que pouvait-il bien y faire bon sang !
Aaron releva le regard vers les ongles claudiquant de sa fille. Elle poussa un soupir tout en continuant. Elle faisait cela depuis bientôt cinq minutes mais ne semblait pas s'en lasser. Sur le moment, c'était sûrement son moyen à elle de décompresser. De toute manière, je vais bien partir un jour de cette maison. Je n'aurais qu'à aller habiter avec Romain tiens ! Aaron s'appuya sur le comptoir et détourna le regard. Ce sujet était difficile entre eux, elle le savait. Aaron supportait difficilement de la savoir avec des jeunes garçons dont il ne connaissait presque pas la tête, mais surtout pas le caractère ni les pensées ! Camélia stoppa enfin ses doigts, laissant le silence retomber dans la pièce. C'est à cet instant qu'Aaron posa un regard sur elle. La jeune femme croisa les bras, se leva et commença à partir vers sa chambre. Aaron eut un mouvement pour la retenir mais elle se retourna d'elle-même. Et... Aaron haussa un sourcil. Qu'allait-elle lui sortir encore ? Une nouvelle critique ? Une nouvelle provocation ? Une phrase qui l'enfermerait dans une passade de remords ? Aaron appréhendait ce que Camélia souhaitait lui révéler. Il ne savait pas à quoi s'attendre et espérait que cela ne serait pas trop dur.
Oui, ses disputes avec sa fille était dure pour lui, comme pour elle. Il n'aimait pas hausser le ton avec elle, ou même tout simplement devoir la sermonner. Cela le rendait triste dès qu'il y songeait. Il avait l'impression qu'elle le détestait plus que tout. Elle savait pertinemment qu'Aaron l'aimait. Il ne pourrait jamais lui en vouloir, tout ce qu'il souhaitait, dès qu'un mot passait le seuil de ses lèvres, c'était la protéger. Lui garantir sécurité et amour. Il ne lui restait plus que quelques années à vivre avec elle avant qu'elle soit libre de chacun de ses mouvements, chacune de ses paroles. Bientôt, il n'aura plus mot sur ses fréquentations et devra la laissait vivre sa vie. Chaque parent peut surmonter, doit surmonter, cette épreuve mais il ne sait pas s'il pourra surmonter ça. Non, en fait rien. Aaron releva la tête vers elle. Perdu dans ses songes, il réalisa qu'elle était déjà partie vers sa chambre de son petit pas rapide. Camélia revient ici ! On a pas terminé ! Aaron passa à son tour dans le petit couloir qui menait aux chambres. Il s'avança vers celle de Camélia et ouvrit la porte. L'adolescente était déjà affalée sur son lit et lui tournait le dos, occupée à autre chose qu'il ne pouvait voir. Il claqua la porte pour signaler sa présence et reprit. Tu ne pars que dans quatre ans alors jusqu'à cette date précise, minuit compris, tu seras sous notre toit et donc sous nos règles ! Il croisa de nouveau les bras et songea à ce que la jeune femme lui avait dit plus tôt. Il se rapprocha d'un pas. Puis je ne sais même plus qui est ce Romain d'ailleurs ! Enfin, il savait mais voulait être certain que sa fille ne soit pas avec quelqu'un d'autre entre temps. Il fronça les sourcils et attendit la réplique. Il espérait qu'elle ne fréquente pas un de ces petits délinquants et qui plus est serait plus âgé qu'elle ! Camélia était belle et il ne souhaitait pas qu'un mauvais garçon l’accoste. Ce qui était un des motifs pour expliquer qu'il voulait moins la voir dans les rues de Fairview.

Spoiler:

Alors que Camélia partait en direction de sa chambre avec un pas rapide, elle entendit la voix de Aaron qui lui disait de revenir dans le salon. Si elle aurait été une enfant sage, qui n'apprécie pas les conflits, alors peut-être qu'elle aurait écouté les paroles de son père et serait revenue afin de terminer la discussion. Seulement ce n'était pas le cas. Elle, elle ne rechignait pas aux conflits, au moins cela permettait de mettre les choses au clair. De plus, l'adolescente était quand même connue pour son tempérament de feu, et son côté rebelle. C'était peut-être d'ailleurs ça qui la caractérisait le plus. Certes, elle n'appréciait pas souvent quand elle se disputait avec Aaron ; mais elle n'y pouvait rien c'était ainsi. L'entendre dire des choses qui ne lui plaisait pas spécialement ; c'était plus fort qu'elle, il fallait qu'elle lui fasse savoir. En lui rétorquant des paroles provocantes sur un ton agressif. Toutefois, à chaque dispute, l'infime peur d'avoir la même altercation qu'avec son ancien père de son ancienne famille d’accueil l'habitait. Cela la terrifiait un peu de défier avec autant de rage celui qui l'avait adopté, celui qu'elle définissait à présent comme étant son père. Mais, c'était comme-ci lui non plus ne pouvait pas s'empêcher de faire quoi que ce soit pour que les nerfs de l'adolescente soient mis à rude épreuve. Même si cela était à prévoir avec leur caractère semblable. Pourtant, Camélia ne se disait pas qu'il fallait peut-être qu'elle se remette en question. Car Lily n'allait pas toujours être là pour les réconcilier. Et qu'il fallait peut-être qu'un jour elle prenne conscience que les disputes ne menaient à rien. Seulement, elle n'arrivait pas à se l'ancrer très clairement dans son esprit. Elle n'avait pas envie de changer de comportement, d'attitude, seulement parce que cela n'allait pas avec celui de son père. Puis, en fin de compte, les conflits c'étaient un peu ce qui rythmait sa vie d'adolescente. Même si celle-ci était déjà assez rythmée comme cela.

Rentrée dans sa chambre, la jeune fille avait mis ses écouteurs ; afin d'essayer d'avoir un minimum de paix, de repos. La musique aidait le plus principalement à calmer ses nerfs. Elle appréciait toujours écouter des centaines de fois la même mélodie sans jamais sans lasser. Bien qu'elle n'avait pas de goûts préférés en musique, Camélia adorait quand même certains morceaux de musique qu'elle ne cessait de réécouter inlassablement. Comme-ci elle les découvrait pour la première fois. Comme-ci à chaque fois la mélodie qu'elle connaissait pourtant si bien, la transportait à nouveau dans un monde chimérique, un monde qui n'appartenait qu'à elle. Où tous ses rêves les plus fous pouvaient se réaliser. Où tous ses soucis du quotidien n'étaient plus présents. Cela la transportait dans un rêve qui lui semblait impossible à atteindre. Quoique que c'était peut-être ça au fond les rêves. Avoir l'illusion qu'on croit que le monde est comme celui qu'on souhaite alors qu'en fait ce n'est pas le cas. Alors, que l'adolescente pensait qu'elle allait pouvoir s'évader un peu du monde dans lequel elle vivait, elle fut très vite rattrapé par la réalité. Et plus précisément par Aaron qui venait de faire irruption dans sa chambre. Elle aurait dû fermer la porte à clé. Si elle aurait eu une clé alors c'est peut-être ce qu'elle aurait fait. Après, que son père est claquée la porte et qu'elle sentit sa présence derrière elle, elle entendit les paroles de celui-ci ayant coupé le son de sa musique. Un soupir se fit entendre quand elle entendit ce que lui disait Aaron. Rien que l'idée qu'elle allait devoir encore rester quatre ans sous les règles de ses parents, et qu'elle n'allait pas être encore libre, la rendait presque mécontente. Camélia arqua un sourcil quand elle l'entendit dire qu'à minuit compris elle devait être rentrer à la maison. Cela la mettait plus en colère qu'elle ne l'avait pensé. Minuit c'était précisément l'heure à laquelle commençait les fêtes. C'était l'heure où les boîtes ouvraient. L'heure où on pouvait le plus s'amuser. Elle était insurgée d'un tel manque de compréhension. Pourtant, aussi étonnant que cela pouvait paraître, elle s’absenta d'une réponse. Car elle savait qu'elle ne pouvait rien y faire. Il était vrai qu'elle était encore sous leur toits et ça jusqu'à ce qu'elle n'ai pas vingt et un ans. Même si cela était assez dur à avaler, à prendre conscience. Étant toujours dos à son père, Camélia mit la main sur son visage, avant de passer la main dans ses cheveux. Elle entendit les bruits de pas de son père, signifiant que celui-ci venait de se rapprocher. Puis, un autre sujet fut abordé. Romain. La jeune fille ne fut pas étonnée quand Aaron lui déclara qu'il ne savait même plus qui était ce Romain. Le fait qu'il le connaissait peut-être avant, avait surpris l'adolescente pendant quelques secondes ; mais elle fut très vite occupée par ses pensées, à la recherche d'une parole à rétorquer.

Si elle parlait de Romain c'était seulement pour faire rager son père, car elle savait qu'il n'apprécierait pas spécialement qu'elle sorte avec un jeune homme comme l'adolescent. Elle ne cessait de lui dire qu'elle aimait beaucoup Romain, qu'ils avaient d'ailleurs déjà prévu des plans ensembles, et qu'elle allait emménager avec lui quand elle le pourrait. Tout n'était que mensonge sur mensonge. Elle appréciait Romain, mais en simple ami, elle ne voulait pas emménager avec lui, ils n'avaient prévu aucun plan ensemble. Et ils n'étaient pas en couple. Et ils le seraient sûrement jamais. Même si le jeune homme était assez charmant, mignon, Rose n'était pas amoureuse de lui. Mais pourtant elle le faisait croire. C'était tellement plaisant, drôle. Presque comme un jeu. Qu'elle jouait toute seule. Après quelques instants de réflexion, ayant pris conscience qu'elle ne lui avait pas tout dit sur l'adolescent, elle s'exclama en se tournant face à lui. « Bien alors abordant le sujet Romain. Je peux te parler de lui si tu veux. Alors il a vingt et un an, habite à Fairview et il est au chômage. On s'est rencontré en boîte de nuit et puis comme tu le sais depuis nous vivons une grande histoire d'amour ensemble. Et depuis c'est aussi l'homme de ma vie. » Ses yeux verts-olives fixèrent le regard de Aaron, afin de voir quelle allait être sa réaction face à un tel manque de provocation. La jeune fille se facilitait presque elle même d'inventer autant de mensonges. Toutefois, tout ce qu'elle disait sur Romain était vrai, bien entendu. Ayant enlevé ses écouteurs, elle décida de s’asseoir en tailleur sur son lit afin d'être mieux assise. Son regard fusilla celui de Aaron pendant quelques minutes. Puis, d'une voix toujours autant agressive, exaspérée, elle répliqua une nouvelle fois. « Lui au moins il me donne de l'attention ! » Si seulement cela était vrai, si seulement cela était vraiment le cas. L'adolescente baissa le regard quelques instants, comme pour soutenir ses propos. Sans réfléchir, de nouvelles paroles franchisèrent le seuil de ses lèvres. « Et lui au moins il me donne de l'amour aussi ! » Le regard toujours baissé, elle ne releva pas la tête pour affronter une nouvelle fois le regard de son père, après ce tissu de mensonge où était ancré une part de révélation.

Bien alors abordant le sujet Romain. Je peux te parler de lui si tu veux. Alors il a vingt et un an, habite à Fairview et il est au chômage. On s'est rencontré en boîte de nuit et puis comme tu le sais depuis nous vivons une grande histoire d'amour ensemble. Et depuis c'est aussi l'homme de ma vie. Camélia s'était relevée en tailleur sur son lit et le défiait du regard. Vingt et un ans ? Au chômage ? L'homme de sa vie ?! Aaron se passa une main dans les cheveux. Qu'est-ce qu'elle pouvait débiter comme bêtises à la minute ! Il planta son regard dans le sien. Il se devait de rester calme. Ou du moins devait tenter de le rester. Mais il avait beau se dire cela, il était déjà sur les nerfs et tout ce qui lui dirait Camélia à présent ne cesserait de l'agacer. Lui au moins il me donne de l'attention ! Aaron voulut répliquer mais il n'en eut pas le temps. Et lui au moins il me donne de l'amour aussi ! Le père de famille eut un temps d'arrêt. Il se recula de quelques pas et croisa les bras. La phrase de sa fille lui revenait aux oreilles, encore et encore. Pensait-elle vraiment ce qu'elle venait de dire. Comme si Aaron ne l'aimait pas. Comme s'il ne l'avait jamais aimée !
Il secoua la tête négativement et s'approcha du lit de sa fille avant de s'y asseoir lentement. Fixant le sol d'un regard perdu, il le releva au bout de quelques minutes vers elle. Camélia... Il ne savait pas comment lui répondre, comment lui faire comprendre. Pourquoi lui dire de telles choses ? A lui ? Alors qu'il faisait tout pour elle et pour sa mère. Aaron avala sa salive tout en décalant un peu plus vers elle. Tu crois vraiment qu'il peut te donner plus d'amour et d'affection plus que moi ? Il se releva finalement, pris d'une soudaine envie de bouger. Sa déception était grande, immense. Il en était presque blessé. Aaron avait tout fait pour qu'elle se sente bien, que ce soit durant les premiers temps qu'elle passa avec eux, jusqu'à maintenant. Mais cela ne suffisait apparemment pas. Il croisa de nouveau les bras et reporta un regard quelque peu embué vers elle. Il se frotta rapidement les yeux avant de reprendre d'une voix un peu plus soutenue. Très bien, vu que je ne te donne pas assez d'attention, ni même assez d'amour, autant ne pas en donner jusqu'au bout. Je ne veux plus te voir avec lui ! D'ailleurs, pour vraiment éviter que cela se produise, tu ne sortiras plus que pour aller faire les courses au magasin avec ta mère ou moi ! Observant la réaction qui allait rapidement arriver de sa fille, Aaron tourna les talons vers la porte. Puis il se stoppa. De toute manière, il a vingt et un ans ! Votre liaison est illégale et je ne te laisserais pas faire d'acte illégal ! Et en plus, il est au chômage, au chômage ! Aaron eut un petit rire nerveux avant de regarder une dernière fois Camélia. Voilà donc qui prouve que je ne te donne pas assez d'amour Camélia. Puis il claqua lourdement la porte, souhaitant lui faire comprendre son désarroi et son incompréhension.

Spoiler:

Elle aimait le danger. Elle ne pouvait pas s'empêcher de toujours affronter, même se mettre en danger. C'était plus fort qu'elle. Ça semblait instinctif. Camélia savait que quelquefois elle en faisait peut-être trop, qu'il fallait qu'elle change de comportement ; mais au fond elle se disait que cela ne servirait à rien. Elle préférait s'amuser de la vie à sa façon, ayant trop longtemps remis en cause son existence. C'était aussi pour ça qu'elle aimait beaucoup les ragots à Fairview ; dire du mal des autres était quelque chose de plaisant à ses yeux. Sûrement comme la plupart des êtres humains. C'était tellement facile de rejeter la faute sur les autres, de parler de leurs problèmes. Comme adolescente elle faisait quand même partie de ceux qui rêvait de construire leur vie. Mais même si elle ne voulait pas se l'avouer entièrement, ça lui faisant le plus grand bien, ça lui faisait plaisir d'appartenir à une famille. Sa famille. Une famille qu'elle n'aurait peut-être jamais pu voir, auquel elle n'aurait peut-être jamais pu appartenir. Mais, comme quoi des fois le destin pouvait bien faire les choses. Alors au fond ce qu'elle venait de dire à Aaron, c'était clairement de l'insolence ; seulement elle ne réussissait pas à lui dire entièrement le fond de ses pensées sans paraître arrogante. C'était plus fort qu'elle. La jeune fille ne se disait pas qu'à tout instant cela pouvait blesser son paternel, que lui verrait cela comme une fausse accusation, comme un reproche plutôt que des paroles véritables. Elle était trop occupée dans ses pensées pour ça. Malheureusement.

La tête toujours baissée, Camélia n'osait pas encore fixer le regard de son père. Elle se contentait de fixer bêtement la couverture de son lit, sans raison apparente. En aucun cas, elle ne regrettait d'avoir prononcé ces mots, ces paroles ; car il fallait bien que cela soit dit un jour. C'était certain. A présent, elle attendait juste la réaction. Une réaction positive ne pouvait pas être imaginer, cela aurait été trop mirobolant. Une réaction négative était plutôt imaginer par l'adolescente. Elle connaissait son père, du moins elle savait qu'il n'avait pas non plus un caractère très posé. Peut-être que cela aurait dû la pousser à être un peu moins insolente, mais pourtant non. D'ailleurs, elle s'étonnait elle même. Elle s'étonnait de cette haine qu'elle ressentait, de ce passé qui semblait pourtant si proche d'elle. Lorsqu'elle sentit que Aaron s'était assis sur son lit, l'adolescente releva la tête. Affrontant son regard, elle pouvait presque lire une déception, et même de la tristesse. Lorsqu'il lui demanda si elle pensait vraiment que Romain pouvait vraiment lui donner plus d'affection et d'amour que lui, Camélia baissa quelques secondes les yeux. Sans hocher la tête, elle resta ainsi avant de poser ses mains sur ses genoux. « En tout cas il m'en donne, au moins. » Elle n'avait pas su quoi rétorquer de plus pertinent, à part cette petite phrase stupide. Ses yeux verts olives croisèrent une nouvelle fois le regard bleuté de Aaron. Celui-ci se leva finalement du lit où il était assis. Sans un mot de plus, se mordant seulement la lèvre inférieure, elle le suivit du regard. Elle le vit croiser les bras, puis reporter sur elle un regard quelque peu embué. Ce regard là, elle pu l'apercevoir quelques secondes. Si la jeune fille s'était attendu à cela. Elle n'avait pas pensé que de telles phrases pouvaient peut-être blesser son père. Ça lui faisait déjà assez de mal à elle toute seule. Son regard se porta sur un coin de sa chambre comme pour fuir ce regard, dont elle ne voulait pas croire qu'elle en était responsable. A la longue, peut-être que lui aussi les conflits devaient l’exaspérer, peut-être qu'il n'arrivait pas réellement à comprendre l'adolescente. Et ça c'était ce qu'elle se disait. Qu'il ne la comprenait pas vraiment. Que s'il le voulait vraiment, alors il la comprendrait ; mais pourtant non. C'était peut-être là aussi le problème, un manque totale de compréhension. Tout comme Camélia n'arrivait pas à comprendre véritablement que Aaron lui donnait de l'affection, mais peut-être pas de la manière qu'elle le voudrait.

La voix forte, soutenue du paternel se fit entendre. Alors qu'elle fixait un point imaginaire dans le vide, Camélia qui entendit parfaitement bien ce qu'il était en train de lui dire, releva la tête en ouvrant la bouche pour montrer sa surprise. Il ne voulait plus la voir avec Romain. Il ne la laissera sortir que pour aller faire les courses. Puisqu'il ne lui donnait pas assez d'amour et d'affection, alors il avait décidé de ne pas en donner jusqu'au bout. La jeune fille crut que c'était une mauvaise blague, qu'elle venait de s'endormir et que ces paroles n'étaient que le fruit d'un rêve. Pourtant non. C'était bien la réalité. Levant les yeux, elle décroisa ses jambes, avant de passer la main dans ses cheveux blonds. « Tu n'es pas sérieux ? » Il pouvait lui dire de ne pas rentrer tard, car elle était encore sous sa responsabilité ; mais lui interdire de voir Romain et de sortir de la maison c'était mirobolant pour Camélia. Elle voulut répliquer autre chose, mais Aaron avait déjà tourné les talons vers la porte. En se stoppant, il continua sur sa lancée, il lui répliqua que de toute manière sa liaison avec l'adolescent était illégal vu qu'il avait vingt et un ans, et qu'en aucun cas il ne la laisserait faire d'acte illégal. Puis, il rétorqua qu'il était au chômage. Cet mot fut prononcé une seconde fois, comme pour montrer la gravité de cela. Une seconde fois, la jeune blonde leva les yeux au ciel. Cette fois-ci en poussant un petit soupir. Il était vrai que c'était un peu illégal le fait qu'un mineur sorte avec un majeur ; mais elle pouvait très bien objecter en répliquant qu'on ne choisissait pas l'être que l'on aimait et que l'amour était plus forte que les lois. Sauf qu'elle ne le fit pas. Une nouvelle fois Aaron venait d'avoir raison. Camélia ne voulait quand même pas se l'avouer, elle était beaucoup trop têtue pour ça. Ensuite, s'il voulait parler du fait qu'il ne la laisserait pas avoir une relation sexuelle avec Romain, la jeune fille se disait qu'il ne fallait mieux ne pas répondre à cela. Car de toute manière il n'y avait aucune chance que cela se produise. Le fait que l'adolescent soit au chômage, n'était pas pour Rose quelque chose de très gravissime ; mais pourtant pour Aaron si. Le rire nerveux de son père qui suivit ses paroles eu comme réflexe de faire lever un sourcil à la jeune fille. Les derniers mots qui suivirent la surprit au plus au point. Cela la blessa même un peu. Cela prouvait donc qu'il ne lui donnait pas assez d'amour. C'était ce qu'il venait de lui dire, d'un ton franc, les yeux dans les yeux. Camélia crut que ses nerfs allaient lâcher, que la tristesse allait se mélanger à la colère. Puis, il s'en alla en claquant la porte ; laissant l'adolescente éberluée et sans un mot sur son lit. Un silence semblait s'être installée après cela. Mais, sans attendre quelques minutes de plus, la jeune fille se leva de son lit, avant de sortir de sa chambre. « Tu n'as pas le droit de me dire ça ! Tu n'as pas le droit de m'interdire ça ! » Si il avait le droit. Elle en était conscience ; mais refusait véritablement de se l'avouer. Faisant à présent face à Aaron dans le couloir, la jeune fille serra les poings avant de rétorquer en criant presque. « De toute manière, tu préfères donner beaucoup plus d'affection à maman que moi ! En fait, tu t'en fous de moi ! » C'était sûrement faux, mais la jeune fille pensait le contraire. Bêtement. Face à cet excès de colère, de rage, d'amertume, les larmes commencèrent à lui monter aux yeux ; mais elle n'y prêta pas grande attention. « Tu ne me remarques que quand ça t'arranges. » La colère se lisait presque dans son regard. Une colère qui lui en voulait de quelque chose où il n'était peut-pas responsable. Elle lui en voulait simplement de ne pas se montrer ce père si attentionné qu'elle aurait aimé qu'il soit, celui dont elle rêvait depuis toute petite. Passant une main sur son visage, elle tourna la tête de l'autre côté. Camélia voulut répliquer autre chose mais cette fois-ci les mots semblaient rester coincés dans au fond de sa gorge, sans vouloir franchir le seuil de ses lèvres.

Pas assez d'amour ? Pas assez d'attention ? La phrase de Camélia harcelait presque Aaron. Il se sentait vraiment idiot, un pauvre imbécile qui essayait tant bien que mal de faire plaisir à sa fille. Qui souhaitait simplement la rendre heureuse. La voir sourire et rire. Et même s'il la grondait souvent, il l'aimait de tout son coeur. Camélia était sa Camélia et personne ne changerait cela. A part peut-être eux deux. Car on pouvait dire que leur relation père-fille n'était pas "aux beaux fixes". Aaron se passa une main sur le visage ? Était-ce si horrible que de vouloir protéger son enfant de ce qui l'attendait dehors ? De toutes les personnes qui allaient sûrement l'entourait ? N'était-ce pas son rôle de la protéger de ce jeune homme bien trop âgé pour elle ? En y repensant, la mâchoire d'Aaron se contracta. Ce jeune adulte n'avait-il pas assez de recul pour penser qu'il n'était pas possible qu'ils soient tout deux ensemble, en couple ? Puis, c'était trop tôt pour eux deux, mais c'était aussi trop tôt pour Aaron... et pour Lily aussi. Le père de famille était sûr que sa femme était du même avis. Bien évidemment que leur fille était trop jeune pour sortir avec des garçons ! Et même pour sortir tout court ! Il avait pris la bonne décision, celle qu'il trouvait la plus judicieuse et c'était son rôle. Il ne devait pas faiblir, pas faire marche arrière. De toute manière, il ne le ferait pas. Il n'en était pas question. Cela l'attristait de devoir être aussi dur, mais il se le devait.
Tu n'es pas sérieux ? Il avait senti beaucoup de remord dans l'exclamation de sa fille. Et il la comprenait. Oui, il acceptait parfaitement qu'elle soit en colère car il aurait été dans le même état durant sa jeunesse. Ses parents à lui avaient eu beaucoup de mal à le canaliser. Du moins jusqu'à ses dix-sept ans. Et on peut même dire que la maison avait été secouée chez les Hammer. Toutefois, tout se terminait bien par la suite, après plusieurs jours sans se parler ni même se regarder. Ainsi, Aaron pouvait la comprendre. Et tout ce que souhaitait ce dernier, c'était qu'elle ne soit pas comme lui, qu'elle ne leur mène pas la vie dure car ils ne le méritaient pas. Camélia n'était pas une enfant à problèmes, loin de là, mais elle avait son propre caractère. Malheureusement bien trop proche de son paternel. Ce qui causait le plus d'ennuis.
Tu n'as pas le droit de me dire ça ! Tu n'as pas le droit de m'interdire ça ! Aaron se retourna vers elle. Camélia était à présent elle aussi sur les nerfs, tout comme lui. Il n'avait pas voulu cela, ou peut-être que cela avait été in-intentionnel. De toute manière, tu préfères donner beaucoup plus d'affection à maman que moi ! En fait, tu t'en fous de moi ! Aaron écarquilla les yeux. Lui ? Donner plus d'attention à sa femme qu'à sa fille ? Ne pas faire attention à elle ? Il resta décontenancé face aux larmes qu'il perçut dans le regard de Camélia. Tu ne me remarques que quand ça t'arranges. Cette dernière phrase le cloua sur place. Tout était faux, bien sûr qu'il la remarquait, qu'elle comptait à ses yeux. Aaron s'avança d'un pas vers elle. Sa voix se fit plus douce, il voyait bien que la conversation tournait sur le fait de s'envoyer des paroles blessantes à la figure. Dans le seul et unique but de faire vraiment mal à l'autre. Et il ne souhaitait pas continuer comme cela, il n'aimait pas la voir ainsi.
Camélia... La voyant détourner le regard sur le côté, son coeur se serra. Jamais je ne porterais plus d'attention à ta mère qu'à toi, c'est totalement faux. Il avait beaucoup de mal à exprimer clairement ce qu'il ressentait. Comment parvenir à faire comprendre ses sentiments ? Bien sûr qu'il aimait sa fille, mais elle ne semblait pas vouloir l'entendre. Et prenait apparemment les moments qu'il passait avec Lily comme un manque d'attention envers elle. C'est pour ton bien que je fais cela et tu le sais. Il écarta une mèche de cheveux blond de son visage et tenta un sourire. J'essaye de t'apporter le plus d'attention possible mais tu sais que c'est compliqué...

Spoiler:

La tête tournée sur le côté, Camélia ferma les yeux quelques secondes. Elle savait que ce qu'elle venait de dire pouvait peut-être avoir choqué, et même vexé son père. Mais, elle n'avait su quoi dire d'autre. Ce qu'elle souhaitait, c'était simplement que quelquefois les disputes cessent et que certaine complicité entre père et fille s'installe. Mais à vrai dire c'était beaucoup plus difficile que penser. C'était plus fort que l'adolescente de créer des tensions avec Aaron, comme-ci c'était instantanée. Et même si elle était hypocrite, lorsqu'elle disait ce qu'elle pensait, alors cela pouvait faire mal à la personne concernée. Quelquefois, sur le moment, elle ne se rendait pas compte de l'effet de ses paroles, c'était seulement après, quand elle voyait les conséquences de telles paroles. Ce qui était trop tard. Seulement, elle ne pouvait pas non plus dire de choses trop blessantes à son père. Car c'était son père, et c'était Aaron. Celui qui l'avait adopté, celui dont les gens disaient qu'elle pouvait véritablement être sa fille. A cet instant, toutes ces pensées futiles, sans importances étaient dans l'esprit de Camélia. C'était la première fois qu'elle osait dire tout cela à son père, c'était la première fois qu'elle osait lui dire qu'elle avait autant besoin de lui. A présent, elle ne pouvait plus faire marche arrière, cela aurait été stupide. Si elle lui aurait dit un simple « Laisse tomber, ce n'est pas grave au fond. » ça n'aurait pas été la vérité. Ça aurait laid et faux. Peut-être que ça n'aurait pas eu le même impact ; mais ce n'était pas ce que penser l'adolescente.

Elle ne savait plus quoi dire, aucun mot ne sortait de sa bouche. Elle redoutait la réaction d'Aaron. Cela lui faisait beaucoup trop pensé à l’altercation qu'elle avait pu avoir avec son ancien père de son ancienne famille d'accueil. Jamais elle n'aurait pu oublier cela. Car on oublie pas cela. On oublie pas même après de longues années une gifle reçue à cause d'une vérité dite. On oublie pas l’humiliation. Camélia se souviendrait toujours du regard impassible des autres enfants de la famille, et de la mère qui était resté sans rien faire, ainsi que du visage neutre, sans compassion du père. Cela avait été la pire chose qu'elle avait vécue. Jamais elle n'avait pensé qu'encore aujourd’hui elle pourrait s'en souvenir, que cela serait toujours présent dans sa mémoire. Puis, c'étaient presque les mêmes mots qu'elle avait prononcés, ces mots qui avaient soudainement mis l'homme en colère. Pourtant, elle savait, se doutait, était certaine qu'Aaron n'était pas comme ça. Ça se lisait dans son regard. Mais, elle pensait véritablement qu'il n'en avait rien à faire d'elle. C'était en tout cas l'impression qu'il lui donnait ; aussi étonnant que cela pouvait être.

Il prononça son nom, d'une voix que la jeune fille n'avait jamais entendu auparavant. Peut-être parce que leurs disputes n'avaient jamais aboutit à un tel conflit entre père et fille. La tête toujours sur le côté, elle n'osait pas encore affronter à nouveau son regard bleu azur, ce regard dont il lui semblait qu'il pouvait vous analyser, en quelque sorte. Quand elle l'entendit répondre que c'était faux, que jamais il ne porterais plus d'attention à sa mère qu'elle ; la jeune fille essuya les quelques larmes qui perlaient sur ses joues. C'était faux. Exactement. Faux mais pourtant elle en avait terriblement l'impression. L'impression qu'elle, elle n'était là simplement que pour que les conflits entre eux explosent, que pour qu'il la prenne encore comme un enfant, comme lorsqu'il l'avait adopté avec Lily. Camélia savait que quelquefois son comportement pouvait paraître injustifié, mais quand elle entendait ce que pouvait lui dire Aaron, pour soi disant la protéger, alors elle le supportait mal. Elle n'arrivait pas à totalement comprendre, même si elle savait qu'elle avait dix-sept ans ; mais pour elle dix-sept ans c'était le moment, l'instant de se prendre en main. Et quelquefois, elle se demandait si son père comprenait véritablement cela. Le laissant parler, elle se mordit la lèvre inférieure quand Aaron lui dit que c'était pour son bien. Certes, elle le savait. Quoique non pas vraiment. L'adolescente n'arrivait pas à comprendre en quoi cela était pour son bien, en quoi cela pouvait lui être bénéfique. Quelques minutes passèrent avant qu'elle ne lève enfin les yeux vers lui. Levant les yeux au ciel, elle reporta son regard vert sur son père, avant de s'exclamer d'une voix moins agressif qu'auparavant. « En quoi c'est pour mon bien ? Franchement en quoi ? Me prouver que tu as de l'autorité sur moi, et que oui je ne suis pas encore majeur, et que donc je suis encore sous ta responsabilité, je ne vois pas ce que ça apporte de bien. » Ses paroles n'avaient pas été dites sur un ton virulent, fort, agressif, ce qui l'étonnait même elle même. Bien qu'elle bouillonnait à l'intérieur d'elle, bien qu'elle était à la fois vexée, triste, et énervée. Énervée de voir qu'au fond peut-être que dire cela ne servait à rien. Triste de voir qu'un père pouvait faire beaucoup de mal à sa fille, inconsciemment, sans qu'il ne se rende compte même lui même. Seulement, Camélia ne remarquait pas non plus qu'elle faisait beaucoup de mal à son père, aussi. Leurs conflits leurs faisaient autant de mal l'un qu'un l'autre. La jeune fille aimerait avoir ce père attentionné, avec qui elle pourrait rigoler et s'amuser. Peut-être qu'au fond c'était pareil pour Aaron. Elle n'en savait rien, ne s'en doutait pas.

De nouveau, quand elle entendit la suite de ses paroles, l'adolescente baissa les yeux. Sauf qu'en fait cela la laissait perplexe, ne sachant pas quoi en penser. Elle ne comprenait plus, c'était comme-ci en fait elle n'arrivait pas à comprendre quelque chose, quelque chose qui pouvait paraître simple. Ou alors compliqué. Tout était compliqué, apparemment, étonnamment. Camélia leva de nouveau le visage, les larmes ne coulaient plus sur ses joues. « Non je ne sais pas en fait. Je ne sais pas que c'est compliqué. Je ne comprend pas pourquoi moi j'ai un père qui ne m'apporte pas l'affection dont j'ai besoin pour grandir dans la vie. Alors, que tu sais autant que moi que c'est simple. Simple de partager un moment entre père et fille comme les autres personnes. » La salive passa difficilement dans sa gorge. Camélia voulait seulement que son père prenne conscience de ce qu'il se passait, qu'il soit encore plus unie comme famille. Passant la main dans ses cheveux, elle baissa à nouveau le regard, la tête baissée elle aussi.

Aaron se souvenait parfaitement de l'année de ses dix-sept ans. Comment ne pas s'en souvenir ? Lui, il n'avait pu en profiter. Lui, il avait passé des mois dans un lit, dans un environnement étouffant et blanc. Jusqu'à ce qu'il ait à peine vingt-quatre ans. Aaron avait passé huit ans de sa vie à l'hôpital. Il n'avait pu connaître le goût de l'amusement comme les autres, il avait dû attendre. Patienter inlassablement. La seule personne lui donnant le sourire dans ces moments-là étant Lily.
Alors à présent, comment parvenir à laisser sa fille entrer dans ce monde d'amusement entre amis alors que cela lui était presque inconnu ? Oui, il avait peur pour elle. Et peur pour lui. Car il savait qu'à chaque moment il pouvait la perdre. Il avait manqué de quitter ce monde à cause de la maladie, il ne la laisserait pas le quitter à cause d'un stupide désir d'adolescente. Il ne le pouvait pas, c'était plus fort que lui.
Mais le pire dans tout cela, c'était qu'il ne s'en rendait pas compte lui-même. Il sentait bien que quelque chose le retenait de la laisser vagabonder dans les rues avec ses copains, de la laisser seule débuter sa propre vie loin de lui. Son esprit de protection s'étendait également à Lily. Le père de famille avait beaucoup de mal à les laisser se débrouiller seul. Il ne supportait pas de ne pas savoir où se trouvait l'une ou l'autre. En aucun cas, en aucune exception. Il ne le tolérait pas. Pourtant, il avait longuement essayait de changer. Un peu du moins. Mais c'était bien plus puissant que lui. Ce sentiment d'impuissance renforçant son pessimisme était bien plus fort que lui, bien plus écrasant. Alors les deux femmes de sa vie devait le supporter. Cela ne semblait plus déranger Lily, même s'il savait qu'il n'avait pas le droit de faire cela, à quiconque. Mais après tout, qu'est-ce que cela pouvait faire ? Il ne les embêtait pas tant que cela. Du moins il en avait l'impression.
Impression vite remise en doute face à l'attitude de Camélia. Car cette dernière ne le supportait pas du tout. Et le fait qu'Aaron ne parvienne d'aucune manière à lui faire comprendre que les épreuves qu'il avait traversées influaient grandement son comportement, n'arrangeait pas réellement les choses.

Non je ne sais pas en fait. Aaron haussa un sourcil. Je ne sais pas que c'est compliqué. Je ne comprend pas pourquoi moi j'ai un père qui ne m'apporte pas l'affection dont j'ai besoin pour grandir dans la vie. Alors, que tu sais autant que moi que c'est simple. Simple de partager un moment entre père et fille comme les autres personnes. Face à l'incompréhension de sa fille, il se passa une main sur le visage. Il ne saurait sûrement jamais comment exprimer clairement qu'il ne voulait que son bien. Pourtant, ne venait-il pas de lui avouer ? Il avala sa salive et chercha la meilleure façon de réitérer ses sentiments et ressentis, et tout cela sans s'énerver. Oui, car les mots de son enfant l'énervaient plus que tout à cet instant précis. Il ne savait pas vraiment comment les interpréter et surtout, comment y rétorquer. Aaron était lui-même plus que perdu. Il poussa un long soupir et croisa de nouveau les bras. A quoi bon être, essayer d'être le plus gentil possible face à une adolescente telle que Camélia ? Avec un caractère aussi téméraire que le sien. Ecoute Camélia, je t'apporte autant d'affection que je le peux, d'accord ? Même si tu n'en as pas manifestement l'impression. Et puis de toute manière, si c'est pour recevoir des phrases aussi cinglantes que les tiennes dans la figure, je n'ai même pas envie de savoir ce que serait passer un moment tous les deux ! Il se retourna et partit vers la cuisine. Il était à bout, il n'en pouvait plus. Ses paroles le blessaient autant à lui qu'à elle. Il n'aimait pas parler ainsi à Camélia, il se détestait même de faire cela mais elle ne lui en laissait pas le choix ! Il se mit à râler dans sa barbe. Simple de partager un moment entre père et fille comme les autres personnes. Il secoua la tête. Comme si nous n'étions pas normaux ! Il se servit un verre d'eau avant de l'engloutir d'une traite. Il ne savait même pas si elle l'avait suivi mais continuer de râler dans son coin, tel un grand enfant.

Spoiler:

La tête baissée, Camélia fixait le sol sans s'y intéressait davantage. Elle cherchait surtout à ne pas croiser pour le moment le regard de son père, qu'elle voulait par dessus tout éviter. Elle ne voulait pas croiser ce regard, ses yeux bleus perçants et la colère qui serait sûrement visible sur son visage. Elle entendit le soupir qu'il fit ; ce qui l’incita à garder la tête baissée. Sur le sol, elle posa son regard sur une marque présente. Ses bras étaient contre son corps, ses doigts s'enfonçant contre la chair de sa main. A cause de la colère. A cause de la tristesse. A cause de ça, de cette énième dispute et de ces révélations. Des révélations qu'elle n'aurait sûrement jamais dite, si elle ne s'était pas disputé avec Aaron. Si ça aurait été le calme plat, elle aurait continué à jalouser dans son coin, sans rien dire, et à crier, à être agressive dès que son père prononçait une parole qui pouvait être mal interpréter. Mais, pourtant elle savait que même si ce qu'elle venait de dire, pouvait être perçu comme un aveu, cela n'allait sûrement rien changé. Car il y avait peu de choses à changer, peu de choses qui pouvait être comprendre. Seule l'adolescente pouvait se comprendre. Mais elle restait quand même perdu. Perdu dans sa phase d'adolescente. D'un côté, on ne la comprenait pas, et de l'autre elle ne comprenait pas non plus. Totalement incompris. C'était totalement insensé cette histoire de jalousie, mais pourtant si réelle. Ce qu'elle ressentait était tellement vague. Un manque d'affection avait besoin d'être comblé en elle, pas par n'importe qui, pas par d'autres personnes, seulement par Aaron. Ce père qu'elle percevait à présent comme le sien, le seul père qu'elle connaissait comme tel. Mais, lui il ne semblait pas vouloir comprendre, pas vouloir lui faire ressentir que c'était et serait à jamais sa fille. Pourtant, Camélia semblait décidé, vouloir que son père lui apporte l'affection tant souhaité. Car à ses yeux ce n'était pas le cas. Même si elle savait que son argument sur le fait qu'il apportait beaucoup trop d'affection à Lily, était un peu stupide. Cela était tout à fait normal en fait. C'était sa femme, sa conjointe, celle qu'il aimait. Mais, pourtant selon l'adolescente, elle, Lily agissait comme une véritable mère, alors qu'il lui semblait que ce n'était pas le cas pour Aaron. Même si son rôle de père était exercé, quelquefois elle avait l'impression qu'elle pouvait se rendre invisible sans aucun problème, et que cela ne serait pas souvent vu. Telle une ombre qui pourrait passer.

Se décidant enfin à lever les yeux, elle vit qu'Aaron avait décidé de croiser les bras, sûrement pour montrer la validité de ses propos, quoique seul le ton de sa voix permettait aussi de comprendre qu'il commençait peut-être en avoir marre. Ecoutant chaque mot, la jeune fille comprit très vite qu'en fait son père n'avais rien compris, que ça n'avait servi à rien de dire cela, étant donné que ça semblait perdu d'avance. Elle l'entendait dire qu'il lui apportait autant d'affection qu'il le pouvait, et ça même si elle n'en avait manifestement pas l'impression ; et qu'il n'avait aucune envie de savoir ce que serait passer un moment ensemble, si c'était pour recevoir des phrases aussi cinglantes que les siennes dans la figure. Ces paroles eut comme réaction de rendre insurgée l'adolescente. Elle ne s'attendait pas du tout à ce qu'il lui dise cela, et que surtout il lui reproche les phrases qu'elle pouvait dire. C'était décidé pour elle, il ne la comprenait pas, il ne comprenait rien. Avec un caractère comme le sien, cela ne l'étonnait guère. Elle se disait même qu'il était étroit d'esprit, à moins qu'il ne le fasse exprès. Certes, Camélia savait que quelquefois elle disait des mots qui pouvait choquer, étonné ; mais de là à ce qu'elle lui dise sans cesse des phrases cinglantes, ce n'était pas vrai. Du moins selon elle. Peut-être que c'était l'impression qu'elle donnait, mais ce n'était pas le cas. Elle resta quelques instants sans un mot, même si les répliques pour rétorquer étaient présentes dans son esprit. La main toujours replié, elle fronça les sourcils. A l'instant même où elle voulut répliquer quelques chose, Aaron était partit dans la cuisine. Comme pour fuir le conflit. Ou alors pour y mettre terme.

Le ton qu'il avait employé dans ses récentes paroles, blessait Camélia, elle qui ne s'était point attendu à cela. Facilement émotive, elle décida pour autant de ne pas pleurer. Mais, elle ne voulait pas pour autant lui donner raison ; voulant rester sur sa position et sur le fait qu'il ne la comprenait pas. Absolument pas. D'un pas vif, elle alla en direction de la cuisine, en se mordant la lèvre inférieure où elle vit Aaron qui marmonnait des paroles inaudibles de l'endroit où elle était. « Et bien tu sais quoi ? Je pense que j'ai eu tord de te dire cela, parce que manifestement tu ne me comprends pas ! Et pouvoir ce n'est pas assez ; tu devrais m'apporter plus d'affection pour que je m'en rende compte alors ! » Puis, elle repartit en sens averse, en direction de sa chambre. Elle ne savait pas si son père continuait encore de râler comme elle l'avait quelque peu entendu. Seules de vagues mots avaient été audibles pour elle.

La colère qu'elle pensait s'être peut-être évaporé, semblait être de nouveau présente en elle. Poussant un râlement, Camélia décida de prendre sa veste qui était posé dans un coin de sa chambre ainsi que son ipod, avant de sortir de sa chambre, avec toujours ce même pas vif qui trahissait sa colère. Et qui trahissait aussi le fait qu'elle venait d'être blessé. Même si elle ne voulait pas le montrer, au fond de ses yeux cela pouvait se voir. Marchant en direction de l'entrée, elle mit ses baskets aux pieds, avant de revenir vers la cuisine où elle se mit à dire d'un ton détaché. « Et en tout cas, ce n'est pas l'impression qu'on donne d'être normaux ! » Sans attendre la moindre réponse, elle décida de sortir dehors, même si quelques instants auparavant Aaron venait de la priver de sortit. La jeune fille prit le double des clés de la maison, au cas où se disait-elle, avant de sortir et de claquer la porte ; comme pour faire croire qu'elle la fermait bien.

Sans se retourner, elle mit ses écouteurs dans ses oreilles et mit en route sa musique, avant de se mettre à marcher dans le quartier Mount Pleasant. La musique guidait ses pas. Elle n'avait aucune de l'endroit où elle voulait aller. Elle souhaitait seulement s'éloigner pendant quelques heures de la maison, d'Aaron, de cette tension électrique, et de cette dispute. Même si elle savait que lorsqu'elle rentrerait chez elle, alors l'ambiance ne serait pas des plus joviale, et que sûrement une nouvelle dispute allait éclater.